vendredi 31 mars 2017

L'épargne salariale, un vrai produit financier !

La Semaine de l'Epargne Salariale s'achève, initiée par quelques institutions de la place (DGT, AMF, AFG, IEFP, CIES ...) et relayée par tous les gestionnaires. Laissons de côté les avantages fiscaux sociaux et les vertus mobilisatrices des salariés et arrêtons-nous un instant sur les placements financiers de l'épargne salariale.

L'épargne salariale est un vrai produit financier, avec tous les risques & opportunités afférents
La règlementation permet de proposer une gamme de fonds, du moins risqué (le fonds monétaire pur) au plus risqué (le fonds en actions de l'entreprise - car mono actions), en passant par des fonds obligataires purs, actions purs, sectoriels, géographiques, à mode de gestion passive, indicielle, ou active, de conviction ....
Le plus souvent, le salarié doit choisir entre 5 ou 6 fonds plus ou moins risqués qui sont accessibles dans son PEE ou dans son PERCO.

1er sujet : le salarié est livré à lui même pour choisir le.s fonds qui correspond.ent à ses attentes - conscientes ou inconscientes - et à ses moyens.

A cet égard, partons du principe que tous les fonds proposés sont en tant que tels de bonne qualité et sont bien gérés.

La question est pour le salarié de trouver le fonds qui lui va bien, comme lorsqu'on cherche un vêtement, il faut qu'il soit à la bonne taille, que la couleur convienne à son teint, que le style soit en cohérence avec l'usage que la personne en fera - elle serait ridicule à porter une robe de soirée pour aller faire ses courses au marché, quand bien même la robe lui sied à merveille.
Pas si simple de savoir si un vêtement vous va bien. Certains savent d'instinct, d'autres se plantent lamentablement. On sait à quel point un conseil bien avisé peut re-looker une personne - gommer son ventre replet, son cou trop long/court, éclaircir son teint cireux ! En matière de placement financier, c'est la même chose.

On entend trop souvent :
  • "Ce fonds est bon, mon collègue en a pris, il me l'a dit" et voilà comment on enfourche un fonds trop dynamique alors qu'un cas de sortie se présente
  • "Ce fonds est nul, l'an dernier il était négatif". Peut-être, mais c'est tout le marché qui était contre-performant, et ce fonds là était plutôt pas mal, dommage de le rejeter.
  •  "Je n'y comprends rien dans tous ces trucs, je ne veux prendre aucun risque". Et la salarié choisit du monétaire et y reste indéfiniment.
De plus, une fois installés sur un fonds, très peu de salariés effectuent une gestion dynamique de leur épargne :
  • ils ne préparent pas les déblocage et omettent d'arbitrer des fonds risqués vers des fonds à risque faible,
  • ils ne reviennent pas sur un placement d'attente pour le dynamiser.
Pourtant, tous les gestionnaires proposent des arbitrages gratuits. Les statistiques de marché montrent que les arbitrages sont très peu utilisés.

La question est : qui peut aider le salarié à réfléchir sur ses besoins ? La réponse : ni l'employeur ni les partenaires sociaux ni ses collègues ne sont habilités à l'aider, ni le teneur de compte d'épargne salariale, car ils ne sont pas conseillers en investissements financiers, ce qui implique d'avoir un statu spécial et d'effectuer un audit patrimonial préalable au conseil en placement.
Le salarié est libre de recourir à un professionnel agréé, il veillera alors à sa parfaite indépendance : son mode de rémunération ne doit pas l'inciter à conseiller des fonds actions, plus rémunérateurs pour lui [les commissions sont plus grosses], alors le salarié va bientôt avoir besoin de récupérer ses avoirs.

Le salarié peut utiliser les outils que lui propose son gestionnaire sur le site Internet : évaluer son profil d'investisseur, choisir le fonds ad hoc, faire des arbitrages.

Le hic est que le salarié est souvent passif au point de se laisser embarquer sur les solutions de placement "par défaut", à savoir, le fonds qui est choisi par les signataires du plan d"épargne pour investir les versements du salarié lorsqu'il ne donne aucune consigne préciser. Or, sur un PEE, ce fonds est presque toujours le fonds le moins risqué de la gamme, c'est à dire le fonds monétaire.

Or, les fonds monétaires sont très peu rentables voire négatifs depuis quelques années. Laisser son argent sur un fonds monétaire revient à perdre du pouvoir d'achat. Ce n'est pas rationnel. Comme évoqué, les salariés épargnants sont négligents avec leur épargne, ils ne choisissent pas les fonds, ne les connaissent pas. Au niveau national, sur les 120 milliards € d'épargne salariale, près de 40 milliards sont investis en fonds monétaire. Les gestionnaires s'alarment de cette situation et tentent des opérations de pédagogie pour convertir les épargnants passifs en épargnants dynamiques, mais ça ne fonctionne pas.

Du coup, certains gestionnaires vont jusqu'à supprimer les fonds monétaires des gammes proposés aux salariés et incitent à fixer un fonds par défaut plus exposé au risque (souvent au risque de taux). Mettons que ça parte d'un bon sentiment !!! Ou alors mettons que ces gestionnaires soient lassés de voir une trop forte proportion de leurs encours sous gestion sur des supports qui leur rapporte très peu (les fonds monétaires sont peu chargés en frais de gestion - en principe, et pendant quelques années, beaucoup des gestionnaires ont été jusqu'à payer ces frais de gestion sur leur propre marge, afin de ne pas afficher des performances négatives aux fonds si prisés par leur clientèle.

Ne plus avoir de fonds monétaire revient à empêcher un salarié de protéger son épargne à l'approche d'un déblocage, c'est déraisonnable.

Mais plus douteux encore, certains gestionnaires décident de changer l'orientation de gestion des fonds monétaires et de leur donner un petit coup de dynamisme en y adjoignant des obligations à court terme. Soyons clairs : l'épargne des salariés change de type de gestion parce que le fonds change lui-même d'orientation de gestion. Cette manipulation se fait en informant les salariés épargnants d'une lettre circulaire, alors que les membres des conseils de surveillance des fonds peuvent ou non être amenés à voter le changement. A cet égard, le respect des bonnes règles de gouvernance est sujet à caution : les porteurs de parts (= les épargnants) et les employeurs sont très peu enclins à siéger à ces conseils et les gestionnaires après 3 convocations voient les résolutions proposées acceptées de fait.

Lire cet article édifiant sur la conversion de 5 milliards € de fonds monétaire













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