mercredi 27 mai 2015

Fonds Euro-croissance ? La concurrence des fonds euro est rude

Les tout jeunes fonds Euro-croissance, (ordonnance du 27 juin 2014, décret et arrêté du 4 et du 12 septembre 2014) offrent une espérance de rendement supérieure à celle des fonds euros classiques en échange d'une garantie moindre (une garantie du capital à un horizon de 8 ans minimum contre une garantie du capital immédiate, quotidienne et à laquelle s'ajoute une garantie de rendement minimum).

  • Ces garanties s'obtiennent en achetant principalement des obligations. Or, les taux de rendement des obligations sont aujourd'hui très bas, un emprunt d'Etat français à 10 ans acheté en mai 2015 rapporte moins de 1% par an. En revanche, l'impact de ces achats sur les rendements d'un fonds Euro-croissance et d'un fonds euros n'est pas le même, c'est une histoire de flux et de stock. Un fonds Euro-croissance est en cours de constitution (100% de flux) et il a un rendement proche de celui du marché, de l'ordre de 1%, alors que le rendement d'un fonds euro, composé majoritairement d'obligations achetées antérieurement avec des rendements supérieurs, est plus élevé car peu influencé (Environ 96% stock et 2% flux en 2014) par les achats faits au bas niveau de taux actuel. Autrement dit, grâce à la mutualisation, en effectuant aujourd'hui un versement dans un fonds euro, vous bénéficiez en partie du niveau de taux passé, ce qui n'est pas le cas en faisant un versement dans un nouveau fonds Euro-croissance. Cette situation, favorable aux nouveaux entrants, s'inverserait si les taux des obligations remontaient à un niveau supérieur au taux des fonds euros.
  • La partie dynamique des fonds Euro-croissance va subir le même effet de flux et de stocks, en défaveur des fonds Euro-croissance.
La conversion d'avoirs d'un fonds euros vers un fonds Euro-croissance n'a pas d'impact fiscal. En revanche, elle revient à abandonner une part de la rémunération dont son épargne devrait bénéficier un jour ou l'autre. Mieux vaut, pour l'instant, rester investi sur le fonds euros et aller chercher de la performance sur des unités de compte actions que d'aller sur un fonds Euro-croissance.

Le gouvernement suit de près le développement des fonds Euro-croissance (objectif de collecte de 50 mds € à 5 ans pour 1,5mds réalisé en 10 mois), s'inquiète de la faiblesse des encours, évoque leur faible attractivité et annonce, lors de la commission des finances du Sénat la semaine dernière :
  • Un nouvel appel à la prudence (= baisse) sur la rémunération délivrée par les assureurs dans les fonds euros. Or la concurrence est très rude entre les assureurs lors de la publication annuelle des taux de rendement des fonds euros. Quel assureur va prendre un risque sur un encours de plus de 1 300 mds €, alors que les fonds Euro-Croissance représentent 1,5 mds € ?
  • Une modification des règles prudentielles de distribution des résultats dans les fonds euros. Une sorte de hold-up partiel sur le rendement de cette épargne.
  • Le transfert d'une quote part de performance latente pour l'épargnant qui quitte un fonds euros pour aller vers un fonds Euro-croissance. Une usine à gaz utopiste.
Une naissance bien difficile pour les fonds Euro-croissance, comme c'était le cas pour leurs prédécesseurs, les DSK, euro-diversifiés...